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LES ETRANGERS AU MIROIR DES SUISSES

Publié le, 06 mai 2008 par

BERNE- Dans le cadre de son 20ème anniversaire, l’Agence de presse Info-Sud, appuyée par la Coopération suisse au développement (DDC), avait convié au mois de février dernier des leaders d’opinions à réfléchir autour de « La Suisse et le Sud : perceptions et réalités.». Deux équipes, francophone et germanophone, formées chacune de 9 personnes, ont été constituées pour répondre à cette question "Que représente le Sud pour les Suisses et la Suisse ?".

L’enseignement principal qui ressort de l’exercice est ainsi l’ambivalence : les perceptions sont tant positives que négatives et, surtout, le même thème engendre autant des sentiments dans un sens que dans l’autre : le tourisme, les relations économiques, les émotions, les migrations, et toutes les autres "familles" thématiques mises en exergue par les participants n’échappent pas à ce constat.

Dans la synthèse issue de l’équipe francophone, il apparaît que : Tous ont convenu au début de l’atelier de la multiplicité des Sud, mais pour des raisons de faisabilité et pour ne pas rétrécir le champ de la réflexion, c’est sciemment que la distinction entre les régions n’a pas été faite. Les inégalités entre les pays du Sud et au sein de chacun d’entre eux ont d’ailleurs été stigmatisées par un post-it au cours de l’exercice.

La multiplicité des Sud explique, mais seulement en partie, l’ambivalence des sentiments à l’égard du Sud. Pour reprendre la distinction faite au sujet des migrants : il y aurait ainsi "les bons et les mauvais" Sud. Nul doute que certaines idées ciblent une région plutôt qu’une autre. Ainsi, au niveau économique, la Chine, l’Inde, le Brésil ont été cités comme des concurrents potentiels pour les entreprises occidentales et leur réussite économique soulignée. Alors que les réflexions autour des guerres ont associé à la notion le mot "tribalisme", faisant une référence implicite à l’Afrique, citée oralement.

Néanmoins, tous s’accordent à dire que dans la même région, il peut y avoir des gagnants et des perdants de la mondialisation des échanges économiques et du tourisme. La vision des rapports économiques entre Nord et Sud prend en compte divers aspects : les rapports d’exploitation du Sud par le Nord aussi bien que les avantages comparatifs du Sud par rapport au Nord.

L’ambivalence des sentiments et perceptions trouve aussi un écho dans le positionnement militant, politique, personnel et éthique des uns et des autres. L’interprétation des rapports économiques Nord-Sud varierait en fonction des obédiences (idée apparue sur un post-it et dans la discussion), de même que les sentiments inspirés par le Sud. Les termes "bonne" ou "mauvaise" conscience sont apparus à plusieurs reprises, avec un rapprochement avec la morale chrétienne fait oralement et explicité par l’idée de "tourisme humanitaire: pour se faire du bien à soi-même et au Sud". Compassion également pour le Sud qui prend le visage de l’enfant ou de la femme victime (surtout du point de vue des participantes féminines). Le jugement sur le tourisme sexuel obéit aux mêmes ambiguïtés: certains le condamnent quand il est qualifié d’illégal, d’autres le renvoient à une transaction économique, pour d’autre encore il s’agit d’une forme d’exploitation de ceux qui ont l’argent sur ceux qui n’en ont pas, etc.

Dans le registre des réactions, l’ambivalence se retrouve également. L’intérêt soulevé par les tragédies (qui font appel à la compassion et à la pitié, de même qu’a la mauvaise conscience, de l’avis des participants) s’oppose dans la perception au désintérêt pour les investissements structurels en faveur du Sud, qui ne jouent pas sur la même corde sensible. La tradition de l’intervention humanitaire suisse (CICR, DDC, etc.) ressort comme un élément positif. En revanche, le positionnement de la Suisse (une des rares idées à faire la distinction entre la Suisse et les Suisses) sur la scène internationale à travers sa politique envers le Sud est vu comme ambigu par plusieurs participants, qui parlent même d’instrumentalisation.

Il est intéressant de souligner que plusieurs participants individuellement ont développé la même idée, reprise ensuite par le groupe : le Sud, c’est l’inconnu, et par conséquent la peur ou plutôt un éventail de peurs, qui se manifestent différemment, mais qui sont liées aux notions de différence et aussi de méconnaissance. D’où une série de clichés qui en découlent, mis également en avant par les participants: "migrants=dealers", "Sud=mer, chaleur, joie de vivre, dépaysement", etc.

Les sentiments ne sont pas les mêmes non plus quand l’étranger est lointain ou proche, quand la problématique à laquelle il se relie touche ou non le Suisse dans sa vie quotidienne. Paradoxalement, la perception du Sud par le Suisse qui se trouve au Sud n’est pas la même quand il se trouve chez lui. Le même Sud vecteur de dépaysement positif et/ou d’aventure devient un Sud hostile quand il prend la forme d’un réfugié dit (ou perçu comme) "économique".

En conclusion, il apparaît que les Suisses ont une vision nuancée du Sud, qui parfois repose sur des clichés, mais aussi sur des analyses, voire de l’introspection. Les participants (qui ne représentaient pas forcément le "Suisse moyen") ont montré une connaissance certaine de diverses problématiques, ainsi qu’une conscience des ambiguïtés du Sud comme de l’ambivalence de leurs propres réactions et perceptions. Il est ainsi important de souligner que plusieurs participants ont évoqué l’effet autoréflexif de la confrontation avec le Sud, qui pousse à s’interroger sur soi-même, sur ses peurs, sur sa situation propre, voire à parler de "cynisme".

Un aperçu des travaux des deux équipes :

A première vue, les différences dans les résultats issus des deux ateliers sont minimes. Dans les deux cas, on retrouve le même paradoxe : le Sud est "étranger" : on le craint et/ou on l’idéalise.

Un éventail de sentiments/ d’émotions est ainsi relié au Sud. Les germanophones ont notamment mis l’accent sur leurs expériences personnelles comme élément important dans la formation de leur jugement sur le Sud, tandis que les francophones ont souligné finalement l’existence d’une méconnaissance du Sud, engendrant les clichés, les sentiments contradictoires et aussi un certain cynisme.

L’impact des médias ne semble pas indifférent sur les perceptions des Suisses, y compris en termes de "modes". Les germanophones ont-ils plus parlé du colonialisme que les francophones en raison des nombreux livres sur le thème actuellement en libraire en langue allemande ? A l’inverse, certains éléments ressortant de l’atelier francophones sont-ils influencés par les médias français, eux-mêmes influencés par le passé colonial de la France ?

Dans les deux groupes des réflexions ont été faites sur le fait que les Suisses ne sont pas la Suisse et que les sentiments des premiers sont à distinguer des axes de la politique suisse en matière de développement notamment.

De même, le Sud est multiple, les deux groupes l’ont souligné. Cependant, l’Afrique est souvent le territoire qui est associé à la notion de Sud (c’est moins flagrant peut-être dans le groupe francophone) ; au niveau du développement économique, en revanche, c’est plutôt l’Asie qui est citée.

A noter l’évolution du concept de "Sud" au cours des 20 dernières années, sur lequel l’ensemble des participants s’entend à dire qu’il est obsolète et ne recouvre pas la réalité des choses. Faudrait-il parler plutôt de "riches" et de "pauvres", maintenant que l’Est (associé au Sud souvent) est dans les frontières de Schengen ?

Par Gorgui Wade Ndoye avec Info Sud et Agenda XXI