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 Dr Maimouna Ndoye,
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Née en Mars 1989, Dr Sofia Santos fait partie de la génération Y (les « millennials » en anglais). N’ayant pas connu la Deuxième guerre mondiale ni même la guerre froide. Etant suffisamment jeune lors de l'introduction massive du « digital » au grand-public, elle se réjouit d’être née dans une Union européenne sans frontières et d’y avoir beaucoup d’amis! Dans le cadre d’Erasmus, elle a fait quelques cours de son Master en Bio-ingénierie de l’Université de Porto avec des étudiants  d’autres pays européens. Par ailleurs Docteure Sofia Santos a fait son doctorat en Biologie Cellulaire et Moléculaire à l’Université Pierre et Marie Curie de Paris, « une ville très multiculturelle au cœur de l’Europe ! » dont l’intensité de la vie politique lui a permis d’ouvrir les yeux sur la vie politique portugaise et sur l’avenir de l’Europe. (Entretiens).

Comment expliquez-vous votre  intérêt pour la politique portugaise?

« Mon intérêt pour la politique est né à Paris où je suis allée faire mon doctorat en Biologie Cellulaire et Moléculaire et là j’ai découvert que les débats politiques sont beaucoup plus intéressants. Il y a beaucoup plus de raisonnement. En France, on explique plus les « pourquoi » et « comment ». On donne les sources d’informations et le processus par lequel l’on prend une telle ou autre position face par exemple aux questions posées par les journalistes. Ce qui n’est pas le cas au Portugal. Le fait donc d’aller vivre à Paris en 2011, m’a permis de mieux appréhender l’irrationnel qu’il y avait très souvent dans les positions des politiciens portugais. Il y a chez eux, des avis infondés et des critiques négatives juste parce qu’il fallait être contre le parti ou la personne d’en face. Bien sûr que j’exagère mais c’était beaucoup plus souvent en France dans les débats télévisés que je rencontrais des explications qui soutenaient la prise de position des uns et des autres.

 

Maintenant que je suis de retour au Portugal, je suis la politique de mon pays avec beaucoup plus d’intérêt, son évolution et ses améliorations. Je continue également à suivre la politique française et internationale (Exemple la déception de l’élection de M. Donald Trump aux Etats-Unis d’Amérique etc…). 

 

 

 

Je peux dire aujourd’hui que je suis très fier de l’évolution de la politique au Portugal et du gouvernement actuel ».

Pourquoi les jeunes de votre génération voient-ils autrement la politique?

« Ma génération n’a pas vécu de guerres civiles ou mondiales (bon, si on considère que la guerre en Syrie n’est pas la nôtre, mais ça c’est une autre discussion). Je n’ai pas non plus vécu en dictature (même si parfois on se demande si la presse a bien sa liberté d’expression !) ou d’autres systèmes politiques extrêmes… Nous sommes nés en démocratie, une démocratie de plus en plus internationale avec la création de l’Union européenne. Une démocratie qui même si elle n’est pas encore parfaite, elle marche suffisamment bien pour que nos pays fonctionnent correctement.

Je voudrais souligner qu’on nous demande de voter à 18 ans mais jusque là on ne nous a jamais appris à nous intéresser réellement à la politique. Parfois on ne sait même pas que la politique est une science… Tout ce qu’on a entendu, c’est que les politiques mentent. On voit aussi quelques scandales liés à la corruption,  les lobbies des grandes entreprises etc !!! Et ça, que ce soit à droite ou à gauche (concepts politiques d’ailleurs qui commencent à nous être familiers mais qu’au fond, on sait juste vaguement ce qu’ils veulent dire) !

Toutes ces raisons font que ma génération regarde la politique autrement ! Plus que les partis en soi, on regarde les personnes qui les représentent. On s’intéresse à leurs propositions même si on se demande comment ils vont les mettre en oeuvre et si elles vont vraiment marcher. On regarde donc de plus en plus la cohérence du parti, la sincérité de la personne qui dirige le parti, sa détermination et sa volonté de faire le mieux pour le pays, pour nous tous ».

 

Que trouvez-vous d’intéressant dans la composition actuelle du Gouvernement Portugais?

« Avant de parler de la composition de notre gouvernement actuel et pourquoi je la trouve intéressante, je pense qu’il est important de dire comment on en est arrivé là pour pouvoir comparer avec d’autres pays, comprendre pourquoi et essayer de voir si c’est possible pour d’autres pays de nous suivre.

 Depuis que ma génération a commencé à entendre parler de politique, nos gouvernements avaient alterné entre centre-gauche et centre-droite sans qu’on ne sente pas beaucoup de changement pour le pays.

On a commencé à parler de crise économique en 2004 quand le Parti social-démocrate (PSD, centre droite) dirigé par Durão Barroso, était en tête de notre gouvernement. Alors bien évidement, c’est le centre gauche, Parti socialiste (PS) qui a gagné les élections suivantes en 2005. Mais la crise continue et en plus, il y a eu un grand scandale de corruption avec le dirigent du PS (José Sócrates), alors on revient au centre droite en 2011 vu que le PSD est dirigé par une nouvelle tête, Pedro Passos Coelho qui forme une alliance baptisée « Portugal à Frente » (En avant Portugal), avec le parti CDS-PP (droite). Et là, soi-disant, sur injonction du FMI, on nous installe l’austérité !!

Les années passent, avec beaucoup de souffrance pour les classes moyennes et les plus pauvres, mais l’Europe était contente de nos résultats obtenus grâce à l’austérité. S’en suivent de bonnes prévisions, alors l’alliance  « En avant Portugal » entre le centre droite et la droite (PSD et CDS-PP) était confiant pour les élections de 2015. En plus, les medias nous parlaient encore beaucoup du cas de corruption de l’ancien dirigeant du parti de centre gauche (PS), José Sócrates, qui a même était en prison (quelque chose dont nous n’étions pas habitués à voir avec des hommes de pouvoir comme les politiques. On imagine que son cas devait être vraiment grave et que ce qu’il a fait était mal pour le centre gauche.

Depuis 2012, Mme Catarina Martins devient la nouvelle tête du parti de la gauche portugaise, Bloc de Gauche (BE au Portugal), un parti qui depuis l’année 2000 n’avait pas encore changé son dirigeant et qui n’avait pas beaucoup de succès au Portugal : il arrivait presque toujours à la 5ème  place à la suite des élections après le PSD de centre droite, le PS de centre gauche,  le CDS-PP de droit et le parti communiste portugais (PCP).

Le fait que le BE était contre les politiques d’austérité imposées par l’Europe à notre pays et bien implémentées par l’alliance gouvernementale « En avant Portugal » a été une bonne position politique car les medias lui attribuent plus de temps d’antenne. En effet, 4 ans après l’implémentation des politiques d’austérité aux pays méditerranéens on se demandait si on devrait continuer ainsi… Pour les élections législatives de 2015, ce que j’ai retenu des débats politiques à la télévision, c’est un discours de Mme Catarina Martins qui était beaucoup plus préoccupée par l'économie portugaise et par le peuple portugais, mais aussi un discours plus constructif et argumenté, avec des objectifs clairs et précis sur lesquels sont fixés des mesures concrètes pour améliorer les conditions de vie des Portugais ; alors que l’alliance « En avant Portugal » se disait fier des résultats obtenus grâce à l’austérité et tentait de discréditer le parti de gauche (BE) en le reliant au parti d’extrême gauche grecque Syriza dont les premières mesures ont provoqué la fermetures des banques en Grèce.

C’est peut être ce discours plus populaire mais surtout plus rationnel de la nouvelle dirigeante du BE mais peut-être aussi parce qu’on voulait un changement de politiques mais que le parti de centre gauche était fragilisé par le scandale de corruption, que lors des élections pour le parlement Portugais en Novembre 2015, le parti de gauche de Mme Catarina Martins devient pour la première fois le 3ème parti le plus important au Portugal, juste après le parti de centre gauche (PS en 2ème) et avant l’alliance CDU (4ème aux élections) formé par le parti communiste portugais (PCP) et le parti écologiste «  les verts » (PEV). L’alliance « En avant Portugal » (PSD et CDS-PP) gagne les élections mais elle perd sa majorité au parlement ce qui l’empêche de former un gouvernement ».

Cette nouvelle donne politique a t elle été la raison de la nouvelle composition du Gouvernement portugais ? 

« Depuis que les résultats des élections sont connus, le Bloc de Gauche (BE) et le parti communiste (PCP) se montrent disponibles pour négocier avec le parti socialiste de centre gauche (PS) dans le but de former un gouvernement majoritaire. Et effectivement, après des semaines de négociations entre les 3 partis et pour la première fois au Portugal, nous avons un gouvernent qui n’est pas formé par le parti arrivé en tête des élections législatives. Et même quand la droite réclamait sa victoire aux élections et les gens se doutaient de la durabilité de l’accord entre les 3 partis de gauche qui ont des idéologies parfois très différentes, la coalition parlementaire entre le PS, BE et PCP, intitulée « Geringonça », fonctionne depuis plus d’un an et est regardé de près par les partis de gauche en Europe.

La composition de mon gouvernement actuel est donc intéressante car elle est plus démocratique vu que pour que les lois soient approuvées il faut l’accord de plusieurs partis. En effet, la plupart de nos lois sont approuvées par la coalition PS, BE et PCP mais d’autres sont passées par approbation du PS (centre gauche) et le PSD (centre droite), ce qui à mon avis est très intéressant car ça augmente la bonne compétition et la motivation de tous les partis ! Une autre chose que ce gouvernement a et que je trouve important en démocratie, c’est une grande représentation des partis de l’opposition (PDS de centre droite et CDS-PP de droite), ce qui enrichit les discussions au parlement et fait évoluer/améliorer les lois ! De plus, les partis qui avaient toujours moins de représentation au gouvernement (BE, PCP et PEV) ont maintenant une place plus importante au parlement et donc une plus grande motivation pour travailler. En effet, le bloc de gauche (BE) est le parti qui a eu plus de projets de lois présentés et approuvés au parlement depuis les élections de 2015, suivi par le PS et le PCP.
 

Quel est votre regard sur l’Europe de manière générale ?

         « Je suis fière d’être une citoyenne européenne. Pour moi, c’est la diversité des cultures qui nous rends plus riches. Chaque pays, avec son histoire, a beaucoup à enseigner aux autres et beaucoup à apprendre avec les autres aussi.

         En ce qui concerne la politique européenne, j’essaie de suivre tous les pays avec plus d’attention notamment la France, l’Espagne, le Royaume Uni et l’Allemagne. Je comprends que les pays méditerranéens qui ont été les plus impactés par la crise économique mais aussi par les politiques d’austérité, se tournent maintenant vers les partis de gauche, comme le Syriza en Grèce et le Podemos en Espagne. Exception pour le Portugal dans cette tendance qui a élu de nouveau le centre droite mais qui est obligé de travailler avec la gauche elle même contrainte de se rassembler ».

Comment avez-vous vécu le Brexit ? 

         « Concernant le Royaume Uni, j’étais déçu du résultat du referendum sur le Brexit, comme la plupart des personnes de ma génération, inclus au Royaume Uni. Je n’ai pas suivi de très près les mois précédents le referendum mais c’est évident pour moi que c’est beaucoup plus facile de croire aux arguments des pro-Brexit vu qu’ils se sont basés uniquement sur des suppositions, que de croire aux arguments de ceux qui sont contre le Brexit, donc contre un changement, alors que la situation du pays n’allait pas bien. Je pense que les citoyens anglais ont utilisé le referendum pour démontrer leur mécontentement par rapport à la situation économique et politique du pays sans mesurer les conséquences d’un tel résultat. Néanmoins, même avec ce résultat, encore une fois, l’Europe, en tant que continent, donne des gages de son attachement à la démocratie. Les négociations pour le Brexit se passent de façon à respecter les intérêts des deux parties, Le Royaume Uni et l’Union Européenne.

         Le côté positif du résultat du referendum sur le Brexit, est qu’il a pu donner une grande leçon au reste de l’Europe. On apprend avec les erreurs et quand beaucoup de gens avaient peur que le reste de l’Europe suive l’exemple du Royaume Uni en sortant de l’Union Européenne, je pense qu’au contraire, la peur d’utiliser un vote aussi important dans le but de manifester son mécontentement a pu influencer les Français lors des dernières  élections présidentielles, qui ont quand même amené Le Front National au second tour mais qui à la fin ont fini par faire confiance aux partis politiques moins radicaux. Je suis très fière de l’élection présidentielle en France. Elle démontre, en quelque sorte, qu’en Europe, nos valeurs sont bien enracinées, en contraste par exemple avec ce que les résultats des élections aux Etats-Unis ont montré.

         J’espère que l’Allemagne, confrontée également aux problèmes de  radicalisation et de terrorisme, suive l’exemple de la France et ne donne pas de majorité aux partis d’extrême droite lors des élections fédérales de cette année, même si je comprends que ces partis peuvent avoir plus de voix liées au contexte de terrorisme mais aussi de la question des migrants".

Propros recueillis par El Hadji Gorgui Wade NDOYE.

 

Quelques références:

 

Résultats élections au Portugal en 2015 :

 

[FR] http://www.lefigaro.fr/international/2015/10/04/01003-20151004ARTFIG00187-au-portugal-la-droite-donnee-largement-gagnante-aux-legislatives.php

 

[FR] http://www.france24.com/fr/20151004-portugal-coalition-sortante-revendique-victoire-elections-legislatives

 

[FR] http://www.lemonde.fr/europe/article/2015/10/05/la-droite-portugaise-gagne-les-elections-mais-perd-sa-majorite-absolue_4782328_3214.html

 

[EN] https://www.thenation.com/article/europes-left-continues-its-rise-to-power-this-time-in-portugal/

 

[EN] http://uk.businessinsider.com/portugal-new-left-wing-coalition-government-2015-11

 

Portugal vu comme un exemple pour l’Europe :

[FR] https://lemouvementreel.com/2017/04/07/le-portugal-modele-pour-la-gauche-europeenne/

[EN] http://www.politico.eu/article/antonio-costa-ps-socialists-european-left-wants-piece-of-portugal-contraption/

[EN] https://www.opendemocracy.net/can-europe-make-it/renato-miguel-do-carmo-andr-barata/contraption-and-future-of-social-democracy-gov

[EN] https://euobserver.com/beyond-brussels/133551

[EN] https://www.theguardian.com/world/2017/feb/21/portugal-shows-there-is-an-alternative-to-austerity

[PT] https://www.publico.pt/2017/01/30/politica/noticia/holandeses-vieram-aprender-como-funciona-a-geringonca-1760061